L’autre Jour… Voilà, voilà ! / Episode 2 Vous vous demandez pourquoi le titre des films en version française sortis au Québec ne portent pas le même nom que lors de leur sortie en France ? Et comment « Dirty Dancing » a été traduit chez nos amis d’outre-Atlantique ? Voici la réponse !
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*** L’auteur ***
Christian (« Kwiscat ») est professeur de danse à Toulouse à l’école de danse « Espace UltraDanse » qu’il a créée il y a quelques années. Il est aussi le chorégraphe de la troupe des « Ultra’s Chicas » et directeur d’édition des éditions « C. Rolland », une maison d’édition de livres principalement axée sur le thème de la danse.
Les personnes ne dansant pas imaginent souvent que chaque danse qu’ils voient est chorégraphiée au millimètre et que les danseurs ont répété durant des heures. S’il est vrai que des heures de travail ont été nécessaires pour parvenir au résultat, il n’est pas certain que la danse ne soit pas issue d’une improvisation. Parlons donc aujourd’hui de ce qui différencie l’improvisation de la chorégraphie, deux manières tout à fait différentes et complémentaires de concevoir la danse.
En cette période de fin de saison, les galas et spectacles de fin d’année sont nombreux dans toutes les villes où des cours de danse sont dispensés. C’est l’occasion de montrer ce qui a été fait durant l’année et de fêter la fin d’une saison où l’on a mis tout son coeur à perfectionner sa danse. Apprendre une chorégraphie pour la reproduire à la perfection lors d’un spectacle est une tâche où la mémoire est beaucoup sollicitée, mais qui a l’avantage, répétition après répétition, d’imprégner le corps des mouvements qui composent la danse. Il n’est donc pas seulement question d’apprendre une poésie par coeur, chacun s’approprie aussi l’esprit de la poésie au point de pouvoir en écrire une nouvelle variante après des heures de répétition. La chorégraphie forme une certaine logique dans les mouvements et cette logique intègre plus ou moins consciemment la danseuse ou le danseur. Cela fait partie de sa formation.
En ce moment, j’ai moi-même des élèves qui travaillent des chorégraphies de ce type. Prenons le cas de cours de rock au niveau débutant. La chorégraphie permet de réviser toutes les figures que l’on a apprises depuis le début de l’année et de les intégrer. Pour mettre un peu de piment dans l’exercice, j’ajoute en général un petit passage où l’interprétation musicale prime sur l’enchaînement de figures. L’apprentissage de l’enchaînement des figures connues et structurées se passe généralement bien. Je précise, pour les lecteurs qui ne pratiquent pas les danses en couple, que ces fameuses figures sont comme des briques ou des séquences de mouvements et de pas que l’on assemble pour former la danse. Pour simplifier, en soirée dansante, on utilise les mêmes briques, mais c’est ordre qui change au gré du danseur et de son aptitude à improviser cette succession selon la musique qu’il entend. Mais je reviens à mon enchaînement chorégraphique. La partie qui pose davantage de problèmes aux élèves habitués à manipuler ces fameuses briques est celle où j’ai un peu changé le rythme des pas et où je propose une gestuelle démonstrative inspirée par la musique et l’histoire que l’on veut raconter aux éventuels spectateurs. Autant la danse à deux improvisée est-elle un dialogue entre les partenaires, autant cet aspect spectacle ajoute-t-il le public comme troisième larron de l’affaire. Les danseurs doivent sortir de leur cadre protégé de la technique réglée du rock qui leur permet d’improviser et, le temps de quelques mesures, faire un tout autre exercice très cadré, mais où l’improvisation n’est plus possible. Cela oblige à écouter la musique et à danser pour un public, bref, à faire ce que font tout le temps les danseuses et danseurs de hip-hop, modern jazz, etc.
Tiens, parlons-en, des danseuses et danseurs de hip-hop, modern jazz et autre danse classique. Leur spécialité, c’est le spectacle en priorité, c’est la performance au sens anglais du terme. Ce n’est donc pas tout à fait la même problématique pour eux. Leur style de danse les habitue à danser soit pour eux-mêmes, soit pour un public. Les spectacles sont donc chorégraphiés au millimètre et il vaut mieux ne pas s’écarter de la ligne dessinée par le chorégraphie sous peine de perturber tout le spectacle. J’admets qu’en hip-hop, ce n’est pas tout à fait cela, car les battles peuvent amener les danseurs à improviser, mais tous les danseurs de hip-hop ne font pas des battles… En modern jazz, classique, etc. tout est donc cadré. La chorégraphie de fin d’année représente le travail de toute la saison et, à chaque représentation, les mouvements doivent être reproduits à l’identique. Il n’y a généralement pas d’improvisation, c’est un exercice que l’on apprend beaucoup plus tard après avoir appris des dizaines de mouvements nouveaux et après avoir suffisamment gagné en maturité pour les faire se succéder en suivant son inspiration. C’est plus difficile que pour les danseurs en couple, car le niveau n’est plus la brique dont je parle plus haut, mais plutôt le gravillon voire le grain de sable. Mais une fois que la danseuse ou le danseur a atteint ce niveau, quelle liberté s’offre à elle/lui ! Cela a toutefois un revers : un danseur formé uniquement au spectacle aura du mal à danser en fonction d’un/une partenaire. On connaît les pas de deux du ballet classique, mais je pense que même dans ce cas les danseurs, bien souvent, dansent chacun l’un à côté de l’autre et assez peu l’un avec l’autre (en dehors des portés, évidemment). La danseuse peut faire une pirouette sans l’aide ou le guidage de son partenaire et le danseur tente généralement de bien se positionner, mais ne donne aucun guidage puisque sa danseuse ne l’utiliserait pas.
On le voit, il y a différents niveaux d’improvisation et différents types de techniques. Je ne crois pas que certains soient davantage « vrais danseurs » que d’autres comme j’entends parfois dire. Les usages sont différents : d’un côté, il y a l’aspect social et convivial de la danse où l’improvisation est faite de briques qu’il faut ordonner un minimum (et parfois de petits cailloux lorsqu’il y a des jeux de jambes ou des attitudes). De l’autre côté, il y a l’aspect, spectaculaire et festif de la danse où l’improvisation se fait au niveau du grain de sable. C’est un peu plus long d’atteindre l’aisance en improvisation, mais le degré de liberté est aussi plus important. Le danseur complet devrait donc être en mesure à la fois de danser avec une/un partenaire en utilisant cette notion de suivi/guidage que tous les danseurs de danse à deux connaissent et de danser librement en improvisation devant un public. Ce sont ces deux qualités qui sont nécessaires dans le cadre de l’émission So You Think You Can Dance dont la nouvelle saison vient de démarrer aux USA. Et c’est peut-être pour cela que j’aime bien ce concept.
C’est en regardant la télévision que j’ai eu l’idée de m’interroger sur ce qui pouvait rapprocher la danse et la cuisine, deux domaines a priori complètement étrangers. En ce moment, plusieurs émissions mettent la danse à l’honneur (et tant mieux !) dans une grille des programmes où, toutes chaînes confondues, les émissions de cuisine fleurissent sans arrêt (Master Chef/TF1, Un dîner presque parfait/M6, L’amour au menu/Direct8, etc.). J’ai vu quelques similitudes entre certaines de ces émissions et non seulement les émissions récurrentes de danse (Danse avec les stars/TF1, La meilleure danse/W9, Dance Street/France ô), mais aussi avec une certaine vision de la danse dans son ensemble. D’ailleurs, ne parle-t-on pas aussi bien de l’art de la danse que de l’art culinaire ?
Ce qui a déclenché ma réflexion est la composition du jury des émissions de type « casting ». Dans les émissions de cuisine, ce sont principalement des hommes qui jugent les candidats. Figurez-vous que dans les émissions de danse c’est aussi le cas. Pourtant, dans les deux domaines, la grande majorité des pratiquantes sont des femmes. En effet, ce sont bien les femmes qui font — encore de nos jours — des petits plats à toute la famille dans la plupart des foyers français et, d’un autre côté, ce sont bien les petites filles qu’on envoie apprendre la danse en tutu dès le plus jeune âge, de même que ce sont les femmes qui fréquentent majoritairement les cours de danse et les soirées dansantes. Je dirais qu’à l’inverse, les amateurs de rugby sont majoritairement des hommes, et cela ne surprendra personne (même s’il y a aussi des amatrices, évidemment). Bon, alors qu’est-ce qui fait que les jurys des émissions de danse ou de cuisine soient composés d’au moins 2/3 d’hommes contre 1/3 de femmes ? Pour la cuisine, il semble que les femmes conservent une activité orientée autour du quotidien et du fait de nourrir une famille, alors que certains hommes aient poussé plus loin l’aspect technique de la cuisine ainsi que la prise de risque pour se diriger vers un côté plus événementiel. On ne mange pas dans le restaurant d’un grand chef tous les jours (en tout cas pas le Français moyen). Je ne vais pas m’étendre davantage là-dessus, car ce n’est pas mon domaine de compétence.
Pour ce qui est de la danse, même les hommes ne sont d’un premier abord pas autant attirés que les femmes, une fois qu’ils y ont mis l’orteil, ils y mettent le pied, puis y sautent à pieds joints. La raison de ce revirement ? En dehors de l’aspect artistique commun entre les hommes et les femmes, il y a aussi un intérêt pour la technique. Cet intérêt s’amplifie chez les hommes au fur et à mesure qu’ils progressent. Je passe sous silence ici le plaisir qui peut être ressenti par un garçon d’évoluer au sein d’un groupe essentiellement féminin. Dans le cas de la danse en couple, j’ajoute que l’effort d’investissement nécessaire pour un danseur débutant est plus important que pour une danseuse. Ainsi, une fois cette difficile étape passée qui consiste à apprendre à la fois la technique des pas, les figues, le guidage et peut-être même des enchaînements, le danseur commence à éprouver le plaisir de danser et de s’exprimer sur la musique. Car c’est lui qui improvise l’enchaînement des figures que le couple danse lors des soirées dansantes. L’aspect technique revient ensuite, car le danseur aperçoit d’étape en étape qu’il lui est possible d’améliorer sa danse en apprenant de nouvelles techniques qui lui amènent de nouvelles figures. Voilà de quoi étonner sa danseuse et, ça, le danseur aime bien. À l’inverse, la danseuse ne recherche pas forcément ce côté performance en dehors des compétitions. Elle veut simplement se divertir en dansant, un peu comme la mère de famille veut simplement « faire à manger ». Cela pourrait bien expliquer, au moins en partie, pourquoi on voit davantage d’hommes dans les jurys des émissions. Je suis persuadé qu’on pourrait écrire un livre entier ou une thèse de sociologie sur le sujet.
En restant un peu dans le sujet, j’ai aussi l’impression que concocter une chorégraphie de danse est très semblable à la réalisation d’une recette de cuisine. On a un thème (la musique), des ingrédients (les pas de base), des techniques (les figures). Prenons l’exemple d’un quatre-quarts. En gros, c’est 1/4 d’oeufs, 1/4 de beurre, 1/4 de sucre, 1/4 de farine (plus 1 ou deux trucs en plus). Tous les quatre-quarts sont faits à partir de cette base et un enchaînement bien précis d’actions (séparer les jaunes des blancs, etc.). À partir de cette recette, il est possible de faire des variantes : quatre-quarts aux pommes, quatre-quarts à la confiture, etc. Pour qu’un enchaînement de rock à plat puisse être reconnu comme un rock à plat, il faut que les danseurs effectuent les pas de base (1, 2, 3 et 4, 5 et 6) et des figures basées sur ce pas de base. Ce sont nos ingrédients et les proportions qui vont avec. La technique de guidage et le style feront le reste. Mais on peut très bien imaginer agrémenter notre enchaînement de petits jeux de jambes ou d’acrobaties. Cette chorégraphie sera toujours un rock, mais les ingrédients supplémentaires lui auront donné son caractère spécifique. Là, il faut trouver la limite entre une danse et une autre. Si je mets essentiellement des acrobaties dans mon enchaînement et que j’utilise un pas de rock sauté durant toute la danse, j’aurais fait un rock acrobatique et non un rock à plat. Ce n’est plus la même danse. C’est comme si, dans ma recette de quatre-quarts, je mets davantage de sucre et de farine, je ne fais plus un quatre-quarts : ce sera un autre gâteau. C’est ainsi que différents chorégraphes, en utilisant, la même musique, les mêmes danseurs et la même technique de danse de base inventeront chacun une chorégraphie complètement différente de l’autre. Ensuite, au public de dire s’il aime ou pas, car tous les goûts sont dans la nature. À chaque chorégraphe son public. Tout l’art reste malgré tout de faire un gâteau qui soit mangeable…
« La meilleure danse » ou « comment comparer l’incomparable », c’est un peu ce qui m’est venu à l’esprit en découvrant la nouvelle émission de danse de W9 il y a trois semaines. Réflexion un peu négative malgré le fait qu’une émission de danse de plus à la télévision française, c’est plutôt bien pour nous, passionnés de cette discipline artistique et de loisir. Encore faudrait-il que les producteurs trouvent ou adaptent une idée qui tienne la route. Après mon article donnant mon avis sur « Danse avec les stars » il y a quelques mois, je vous livre mes pensées sur cette nouvelle émission après ses trois premiers épisodes.
« Qui fera la meilleure danse » est diffusée sur la chaîne W9 le mardi soir en prime time depuis quelques semaines. Le principe est celui du télé-crochet : des candidats passent devant un jury et se font éliminer de semaine en semaine. Le jury est composé de trois spécialistes de la danse : Marie-Agnès Gillot, danseuse étoile à l’Opéra de Paris, Franco Dragone, un directeur artistique et metteur en scène et Redha, un chorégraphe qui a travaillé entre autres avec Patrick Dupont et la troupe de la comédie musicale Roméo et Juliette. Le vainqueur remportera la somme de 30 000 euros et intégrera la troupe d’un spectacle mis en scène par Franco Dragone. Au départ, il y avait plus de 3000 candidatures et la sélection initiale n’en a retenu que 32 pour passer dans l’émission. La présentation est assurée par Stéphane Rotenberg. Jusque-là, c’est assez classique, sauf si l’on ajoute que les candidats se présentent en solo ou en groupe/troupe. Ici, ça commence à ressembler à une sorte d’Incroyable Talent dédié à la danse (un peu à la manière de « Gotta Dance » à l’étranger). Voici la bande-annonce de l’émission :
Le reste du concept est un peu étrange puisque la sélection prend la forme d’une série de duels. Les candidats ont la possibilité de choisir celui/ceux contre qui ils vont se présenter en duel devant le jury. L’un des deux sera automatiquement éliminé, mais il y a une possibilité de repêchage à la fin de l’émission parmi ceux qui ont perdu les duels. Il n’y a donc pas de réel classement des candidats et des prestations et dans un duel il y a forcément un gagnant et un perdant. Inévitablement, le gagnant est parfois le moins pire des deux, à défaut de qualité… L’avantage de cette formule, c’est qu’on voit un spectacle varié aussi bien en terme de style, que de sensibilité artistique. Mais le gros reproche que je fais à cette formule, c’est qu’un duel peut très bien opposer une danseuse de ballet classique à un couple de rock acrobatique. Comment comparer ces deux choses qui n’ont rien à voir ?
Chaque danseur danse selon son propre langage. Les danseurs de ballet classique ont une certaine technique, une certaine esthétique et une certaine vision de la danse. Cela forme non seulement leur langage de danse, mais aussi leur culture personnelle dans ce domaine. Ainsi, un danseur de rock acrobatique pense-t-il performance, rythme et acrobatie, alors que la danseuse de ballet pense esthétique, interprétation et technique (pour faire court, évidemment). Ils dansent tous les deux, mais leur danse n’a rien à voir. C’est un peut comme si l’on compare le miaulement d’un chat avec le piaillement d’un oiseau. Chacun s’exprime, mais c’est différent. Peut-on dire entre un « miaou » et un « cui-cui » lequel est le plus « beau » ? Une autre image : peut-on dire qu’un poème en français de Baudelaire est meilleur qu’un poème en anglais d’Edgar Allan Poe ou qu’un poème en japonais de Yosa Buson ? Les langues sont différentes, les cultures sont différentes, les sonorités et les caractères d’écriture sont différents. À la limite, peut-on comparer les idées… Mais le reste ?
Encore plus loin : comment dire si l’un est meilleur que l’autre, alors même que l’on ne maîtrise qu’une de ces langues ? Là se trouve aussi l’épineux problème du jury qui est compétent, chaque membre étant dans un univers culturel de la danse qui lui est propre. En l’occurrence, il me semble qu’aucun d’eux ne puisse juger réellement une danse en couple telle qu’un rock ou un boogie sur un critère autre qu’esthétique. Je prends l’exemple de la prestation de Yann-Alrick et Flore (boogie/lindy) durant la seconde émission. On a pu entendre l’un des membres du jury dire à propos du boogie : « c’est nouveau ». C’est en effet nouveau pour lui, qui n’en avait peut-être jamais vu, mais cette danse n’est pas nouvelle. Ce que je veux dire par là, c’est qu’il faut relativiser trois choses sur cette émission : 1) le fait que le duel ne permet pas forcément de finir la sélection avec les meilleurs au classement général puisque les duels ne sont pas faits entre les éliminés, 2) le fait qu’on compare des choux et des carottes (ce sont des légumes, certes, mais pas réellement comparables), et 3) le fait que le jury n’est représentatif que d’une partie de la diversité des danseurs et des styles de danse existant.
Sinon, que dire de cette « meilleure danse » du point de vue télévisuel et spectacle. Tout d’abord, c’est de la danse. Donc, un bon point. Ensuite, les candidats sélectionnés sont d’un bon niveau d’une manière générale. Donc, un second bon point. Je trouve intéressant de mêler les divers courants de danse et de s’ouvrir l’esprit par cette occasion à d’autres manières d’aborder la danse (faisons abstraction de cette notion de pseudo-compétition). Comme l’objectif de cette émission — ne l’oublions pas — est de faire un casting en vue d’une figuration dans un spectacle, on comprend aussi que le jury fera son choix en conséquence. Par conséquent, une troupe aux talents variés aura probablement plus de chances qu’une danseuse seule un peu originale. Il y a aussi une question de personnalité. Par exemple, dans l’épisode 1, Stéphane (qui est allé au repêchage) me fait penser à Blake de la saison 1 de « So You Think You Can Dance » (mon émission de référence). Il a un ego très important, mais une technique très bonne. L’arrogance du Français a d’ailleurs été « saluée » par Rédha et il n’a pas été repêché. En tout cas, la rébellion du candidat par rapport au jury fait parler d’elle et cela fait du spectacle et de l’audience. J’ai aussi remarqué dans l’épisode 1 que Maé (7 fois championne du monde de danse) est éliminée alors que le groupe des filles burlesques (à la Pussycat Dolls) est repêché alors que ces dernières n’ont pas réellement un niveau technique suffisant. Là, clairement, c’est aussi le spectacle (et sa « bankabilité » pour faire un néologisme à la mode) qui prend le dessus à mon avis. Je m’interroge aussi sur les dessous des éliminatoires faits par la production (il n’est dit nulle part que les trois membres du jury ont fait passer les présélections aux 3000 candidats). Là aussi, peut-être des choix orientés « production » et « audimat » ont-ils été faits.
À l’heure actuelle, je ne sais pas si les duels vont se poursuivre tels quels jusqu’à la fin. Est-ce que le jury continuera de décider ou est-ce que W9 cédera au revenu substantiel formé par des votes des téléspectateurs par SMS ou ligne surtaxée ? Malgré les défauts, ce serait dommage de manquer l’une des émissions consacrées à la danse à la télévision française. Lorsque j’ai entendu parler du projet de W9, je me suis dit « Tiens, peut-être enfin l’émission que j’attends ? ». En fait, non. Le « So You Think You Can Dance » à la française n’est pas encore né et je n’ai pas encore vu de concept d’émission de danse qui rassemble autant les amateurs de toutes les danses, des ballets aux danses en couple sportives. Cela n’empêchera pas que je continuerai de suivre les prochains épisodes de « La meilleure danse » sur W9.
Au fil de mes activités dans le vaste et varié monde de la danse, il m’arrive de m’arrêter et de réfléchir un peu sur la manière dont la danse se relie à certains thèmes généraux. Dans cet article, je vous livre quelques pensées relatives au temps. Comme d’habitude, c’est sans prétention et les grands penseurs de notre époque pourraient sûrement approfondir ce sujet de manière plus stricte. Cela dit, je ne suis pas persuadé que les grands penseurs en question pratiquent la danse de manière intensive… et c’est très dommage.
Quand on débute l’apprentissage de la danse, on est évidemment toujours pressé de parvenir au stade où notre pratique ressemblera à quelque chose. Cette impatience est naturelle, mais le temps nous semble particulièrement long avant d’y aboutir… si l’on y aboutit. On voit passer les heures d’effort et d’acharnement pour progresser et, d’étape en étape, améliorer sa manière de danser. Au tout début, ça va assez vite, mais assez rapidement, ça marche par paliers. On arrive sur une marche et on y reste un certain temps. Certains ont plus de facilités que d’autres. Certains dansent plus que d’autres (et cela facilite le passage d’une marche à l’autre de beaucoup danser…). Lorsqu’on est sur une marche, le temps peut toutefois sembler long. On espère voir le déclic se faire, mais malgré les efforts soutenus il tarde à pointer le bout de son nez. Jusqu’au jour où, le voilà ! Et c’est un bonheur que l’on savoure et qui donne l’énergie pour se lancer dans l’étape suivante qui est susceptible de durer, durer. Dans l’apprentissage de la danse, la patience est particulièrement importante, car on modèle à la fois son corps et son esprit. Et cela prend nécessairement du temps. On ne peut pas apprendre à danser en une heure, ni même en dix. Dans ce laps de temps, on ne fait qu’une approche de la danse ; on ne fait qu’entrouvrir la porte d’une salle de jeux immense.
Lorsqu’on est davantage expérimenté, le temps d’apprentissage d’un nouveau mouvement est plus court que lorsqu’on débute. Cela est d’autant plus vrai quand l’on a pratiqué des techniques de danse et des styles variés. Au fil de l’apprentissage, notre corps et notre cerveau remplissent leur bibliothèque de tous ces mouvements sur lesquels ils vont ensuite bâtir d’autres mouvements. Les bases de chaque danse constituent un alphabet qui sert à former les mots d’une langue. Lorsqu’on a appris plusieurs alphabets, c’est d’autant plus facile de parler différentes langues. Il arrive même que les mots de plusieurs langues puissent se juxtaposer dans une même phrase. Comme dans l’apprentissage des langues, plus on apprend de langues, moins on met de temps pour apprendre les bases d’une autre. Pour pousser l’analogie jusqu’au bout, le seul risque est de ne pas tout à fait maîtriser parfaitement chaque accent qui se voit perturbé par les autres, mais au moins on se fait comprendre par de nombreuses personnes.
Quand l’on danse, le temps n’a plus la même valeur que lorsqu’on ne danse pas. C’est là où l’on voit que le temps est vraiment relatif : si l’on est absorbé par une activité où l’on prend du plaisir, le temps semble passer tellement plus vite. Si l’on danse pour soi, il suffit de se laisser porter par la musique. On oublie tout ce qui est autour : vie professionnelle, problèmes, fatigue, etc. Seule compte la musique et l’interprétation que l’on en fait dans la danse. La musique s’arrêtera forcément avant que l’on désire soi-même s’arrêter de danser (ou alors c’est que la musique n’était pas à notre goût !). Si l’on danse avec un(e) partenaire, cela peut être différent. On danse en permanence interaction avec son environnement : partenaire, autres danseurs autour, musique, éclairage, etc. L’inspiration d’une danse improvisée à deux vient de tout cela. Les minutes sont longues lorsqu’on danse avec quelqu’un avec qui cela n’accroche pas ou sur une musique qui ne nous convient pas. En revanche, le temps peut tout aussi bien se révéler très court si tout l’environnement s’y prête : un(e) partenaire agréable, de la place sur la piste de danse, une bonne musique, un éclairage par trop violent, etc. Il arrive que, dans ces conditions, on souhaite que le temps s’arrête et que l’instant dure…
Nous arrivons bientôt dans la dernière partie de l’année, la dernière ligne droite avant un événement que certains élèves vont vivre : le gala de danse de fin d’année. Certains on déjà commencé à le préparer depuis plusieurs semaines, d’autres ne font que commencer. Dans tous les cas, cette préparation est une petite épreuve et, jour après jour, chacun attend d’être déjà au jour j, où la chorégraphie est mémorisée et où l’on se lance devant le public. Les événements sont variés durant toute cette période de préparation qui semble longue pour certains (« vivement qu’on y soit ! ») et courte pour d’autres (« mais il y a trop de choses à mémoriser en si peu de temps ! »). La préparation d’un spectacle est longue si le spectacle doit être de bonne qualité. Et la durée du spectacle est courte quand on y est prêt. On a à peine eu le temps de prendre conscience que l’on danse sur scène que c’est déjà fini. Un vide s’installe. Il est clair que l’essentiel n’est pas toujours l’objectif en lui-même, mais le chemin parcouru pour y parvenir. Il faut parfois se faire violence pour passer les étapes et se dépasser. Ensuite, peu importe si l’on a quelques ratés durant le spectacle (qui dans ce cas est amateur), on aura beaucoup progressé dans la préparation et on est prêt pour aller encore plus loin la saison suivante.
Il y a un temps pour tout. Quand la danse est un loisir, le temps s’arrête quelques minutes, quelques heures, alors que l’on prend un cours, que l’on danse en spectacle, que l’on participe à une soirée ou que l’on fait quelques pas chez soi ou ailleurs, juste pour le plaisir. Tout comme le dit mathématiquement Einstein, le temps est relatif, tout dépend du point de vue où l’on se trouve. Néanmoins, il faut savoir se réserver du temps pour danser, peu importe l’endroit, peu importe la météo, peu importe son niveau. Ce serait dommage d’arriver un jour et de se dire « j’aurais dû danser plus quand je le pouvais ». D’ailleurs, la danse entretient la forme. Si l’on commence à danser tôt dans sa vie et qu’on poursuit la pratique à doses raisonnables par la suite, on se donne un avantage à la fois physique et moral (la pratique de la danse est un excellent antidépresseur). Bref, la semaine prochaine, vendredi, c’est la journée de la danse et je ne peux que vous encourager à danser que vous soyez déjà initié ou que vous soyez néophyte !
Cela fait plus de deux ans, dans ce blog, je faisais la remarque qu’il n’y avait pas d’émissions de danse grand public à la télévision française et j’émettais le souhait que la situation change. Est-ce suite à mon message (soyons un peu mégalos !) ou est-ce l’évolution naturelle du paysage audiovisuel (soyons un peu réalistes…) ? Toujours est-il que depuis deux semaines une émission de danse en couple passe en prime time sur une grande chaîne française. Il s’agit de « Danse avec les stars » qui passe sur TF1 le samedi à 20h35. Après deux semaines d’émission, il est temps de faire un petit bilan avec un regard de danseur amateur de télévision… non sans avoir refait un petit tour d’horizon du PAFD, le Paysage Audiovisuel Français de la Danse, une exclusivité UltraDanse.com !
Contrairement à ce que certains pourraient croire, entre mon article de 2008 et aujourd’hui, la présence d’émissions de danse à la télévision française n’a pas été nulle. Et je dirais même que, dans l’année qui s’est écoulée, il y en a eu plusieurs. Le tout était de ne pas les manquer… Les émissions en question étaient de plusieurs ordres. Il y avait tout d’abord les émissions où la danse était mêlée à d’autres arts du spectacle. C’est par exemple le cas de l’émission La France a un incroyable talent de M6, adaptation de l’émission américaine America’s Got Talent. Les danseurs en solo ou en groupe ont bien souvent été au premier plan parmi les votes de cette émission de type télé-crochet. Le dernier cas en date est celui du tout jeune couple de danse Axel et Alizée qui sont sortis vainqueurs de la saison en montrant de la danse sportive. Il est à noter que sur 5 saisons de 2006 à 2010, les vainqueurs ont été par 4 fois des danseurs.
En plus des émissions non spécialisées, il y a aussi eu des émissions entièrement dédiées à la danse. Je passe ici sous silence les rediffusions de championnats de danse sportive sur France 3 et Paris Première ainsi que les divers spectacles diffusés sur Arte et Mezzo, par exemple, que l’on connaît depuis déjà un certain temps. Côté séries d’émissions, il y a par exemple eu Dance Street sur France ô (chaîne du groupe France Télévisions). Le principe était que chaque semaine quatre groupes de danseurs, confrontés à diverses épreuves éliminatoires et au vote du public, se défiaient sur des danses dites « urbaines ». Ils devaient convaincre un jury composé du danseur Bruce Ykandji, du chanteur Jessy Matador, et de la professeur de danse Malika Benjelloun. L’équipe gagnante obtenait le droit de participer à une grande soirée événement ou d’apparaître dans un clip. Le casting était un peu biaisé à mon sens, car on essayait de faire rentrer dans la case « danse urbaine » le coupé-décalé, le forro ou encore la danse latine. Il est clair que cela ne pouvait être qu’une troupe de hip-hop qui pouvait en ressortir vainqueur, en 2010 en l’occurrence, ce furent les « 91 Pact » avec du hip-hop new style. Finalement, une émission qui doit encore gagner en maturité malgré certaines prestations de danse de très bonne qualité… Une autre série d’émissions récente était U Dance sur NRJ12, dont c’était la seconde saison en 2010. La finalité gagner sa place pour danser devant 3000 personnes sur la scène mythique de l’Olympia aux cotés de M. Pokora (dont je vais vous reparler un peu plus bas…). Lors d’un grand casting national, 5 candidates ont été retenues pour participer à l’aventure. C’est à Barcelone qu’elles ont rejoint M. Pokora durant 1 semaine et Mylène, Kiya, Ambre, Laure et Emilie ont du relever des challenges quotidiens. Entraînées et épaulées par Laura Treves, une chorégraphe au caractère de feu, elles ont du repousser leurs limites pour montrer qu’elles étaient à la hauteur de l’enjeu. Côté résultat, Émilie a été élue par le public pour faire un solo avec la star et Mylène choisie par M. Pokora pour être le leader du groupe.
En plus des émissions entièrement en français, il y avait aussi des émissions en anglais, mais doublées en français. Une première émission s’appelait Got to Dance. La saison 1 (2009-2010) de cette émission anglaise de casting de danseurs initialement diffusée sur Sky 1 a été diffusée doublée en français sur Gulli (chaîne 18 de la TNT). Parmi le jury on trouvait Ashley Banjo, le leader de la troupe Diversity (vainqueur de « Britain’s Got Talent », l’équivalente anglaise de notre « Incroyable talent » qui a révélé Susan Boyle), ainsi que Kimberly Wyatt (membre des Pussycat Dolls) et Adam Garcia (danseur à claquettes d’origine australienne). L’objectif était de sélectionner la meilleure troupe de danseurs par le biais d’un casting éliminatoire. Ici, il ne s’agissait donc pas de danseurs en solo, mais de prestations en groupe. Dans un registre différent, mais toujours en doublage en français, il y a eu une autre émission récente au concept plus original. Il s’agit de Dance your ass off, émission américaine diffusée en France sur Virgin 17 (l’ancien nom de l’actuelle chaîne DirectStar). L’objectif était, pour un ensemble de personnes à forte corpulence, de perdre un maximum de poids en dansant en association avec un danseur professionnel. Bien sûr, sur plusieurs semaines, l’épreuve portait ses fruits. Les bienfaits de la danse sur la santé sont à présent bien reconnus. Deux saisons de cette émission ont été produites. La première saison était présentée par Marissa Winokur (demi-finaliste dans Dancing With the Stars, saison 6 — voir un peu plus loin à quoi correspond cette émission — et ayant joué dans la version Broadway du film Hairspray) et la seconde par Mel B des Spice Girls (elle aussi demi-finaliste dans Dancing With the Stars, saison 5, mais moins potelée…). Et malgré cela vous pensiez qu’il n’y avait pas beaucoup de danse à la télévision ? La difficulté était juste de trouver la bonne chaîne et le bon horaire. J’essaye d’afficher dans la section « actualités/médias » d’UltraDanse les informations quand je les ai assez tôt, restez donc à l’écoute !
Venons-en à l’émission dont je parlais dans l’introduction de cet article… Danse avec les Stars est l’adaptation française de l’émission anglaise Strictly Come Dancing (également adaptée aux États-Unis sous le titre Dancing with the Stars). En France, elle est présentée par Sandrine Quétier et Vincent Cerutti. Sa diffusion a lieu sur TF1, depuis le 12 février à 20 heures 45 pour une série de 6 émissions. Les noms des célébrités (les fameuses « stars ») qui participent à l’émission sont: David Ginola, Sofia Essaïdi, Adriana Karembeu, André Manoukian, Jean-Marie Bigard, Rossy de Palma, M. Pokora et Marthe Mercadier. Chaque semaine l’un d’eux est éliminé par un vote composé à 50% de celui du jury et à 50% de celui des téléspectateurs qui votent par SMS ou téléphone. Le jury du plateau est composé d’Alessandra Martines (ancienne ballerine et actrice d’origine Italienne), Jean-Marc Généreux (venant du Canada, compétiteur de danse sportive et chorégraphe dans So You Think You Can Dance) et Chris Marques (ancien compétiteur en salsa et chorégraphe dans Strictly Come Dancing, d’origine franco-portugaise exilé en Angleterre). On peut se demander pourquoi la production n’a pas retenu un seul danseur actif en France pour former le jury. Pourtant des professionnels très reconnus avaient passé le casting pour le jury. Si le critère était de « crier » son avis, de se montrer et d’avoir de bons « jeux de mots » lors de l’annonce des résultats, il est sûr qu’ils ont fait le bon choix… Même si le jury peut être considéré comme légitime, les critères « télévisuels » sont encore manifestement trop prédominants par rapport à la danse proprement dite.
À chaque émission, plusieurs danses sont présentées par les couples composés d’une célébrité et d’une danseuse/d’un danseur professionnel(le). Il s’agit d’une des 10 danses que compte la danse sportive (celle des compétitions). Pas de rock, pas de java, pas de lindy hop, ni de tango argentin donc (du moins pour l’instant). Commençons par le positif.
Il y a de jolies prestations comme celles de Sofia Essaïdi et de M. Pokora, deux artistes jeunes avec en plus un background de danseurs (mais pas en couple). En revanche, il y a aussi des prestations désastreuses comme celles de Marthe Mercadier (et l’âge n’est malheureusement pas le seul responsable). Bref, il y a à boire et à manger, mais le critère qui prime, encore une fois, est le spectacle de divertissement, même si la danse n’est pas réussie. Alors, dans ce genre d’émission, qu’est-ce qui fait un bon résultat ?
C’est un ensemble de facteurs dont une star douée pour la danse et motivée, un professionnel compétent et qui sait rendre rapidement accessible une technique complexe à un néophyte, une chorégraphie qui fait un joli spectacle sans négliger la base de la danse utilisée et enfin une jolie musique. Parlons-en de la musique… Je m’interroge sur l’utilisation de certains titres qui me semblent totalement en décalage par rapport à la danse annoncée. Samedi, il y avait une « rumba » sur « Time of My Life » de la BO de Dirty Dancing qui n’a rien à voir avec une rumba. La semaine précédente, il y avait une « valse » sur « Cry Me a River » où la soi-disant valse ne correspondait pas à la musique. Dans les deux cas, il s’agissait du même couple de danseurs (Bigard et Fauve) ; je ne sais pas d’où vient le problème, mais même sans être puriste un débutant prenant des cours de danse en couple en école ou association n’a aucune chance de s’y retrouver. Bref, en conclusion sur cette émission, disons que c’est une initiative positive, car elle a l’avantage de proposer de la danse à une heure de grande écoute. C’est très bien pour le grand public qui ne danse pas et cherche un divertissement. Toutefois, les erreurs de jeunesse et le manque de rigueur au niveau de la danse en elle-même pourraient générer des critiques au sein des personnes qui savent déjà danser et qui auront peut-être du mal à comprendre que la danse n’est qu’un facteur de jugement parmi tant d’autres. Et malgré tout cela, je suis chaque semaine devant l’écran, car peu importe ce que l’on pense, ça fait quand même du bien de voir de la danse à la télévision et j’espère que cela en motivera plus d’un à s’y essayer en vrai.
Me voilà encore arrivé à la fin d’un article fleuve… J’avais pourtant pris la résolution de faire plus court cette année ! Ca compensera donc le début d’année irrégulier de ce blog. Il donc est temps de conclure… Voilà, voilà. J’attends toujours avec impatience l’adaptation française de mon émission de danse préférée So You Think You Can Dance qui doit attaquer cette année sa huitième saison. Je ne parle pas ici du doublage en français qui a déjà été diffusé sur DirectStar pour la saison 3 américaine (tiens, je l’avais oubliée dans la liste, celle-là…), mais d’une vraie version française avec des danseuses et danseurs français ainsi qu’un jury français de bon niveau. Si cela pouvait se faire sans frilosité et avec les moyens adéquats, cela ravirait, je pense, toute la communauté de la danse en France (et probablement en Belgique et en Suisse aussi). Mais sait-on jamais que mon message soit entendu un jour jusqu’au niveau des producteurs et diffuseurs ?
Aujourd’hui, je vous propose de parler des bases techniques de la danse. En effet, les professeurs de danse ont l’habitude de toujours commencer leurs cours du niveau débutant par la même chose. Invariablement, les premiers pas, les premiers mouvements, les premières figures seront les mêmes, peu importe le nombre d’élèves et peu importe leur aisance naturelle. Ces premiers éléments que l’on découvre lorsqu’on débute dans un style de danse sont appelés les bases.
Si l’on regarde dans le dictionnaire Larousse, on trouve la définition suivante pour le mot « base ». Base :nom féminin, (latin basis, du grec basis, allure) (1) Assise, socle, support sur lesquels repose un objet : La base d’une colonne. (2) Partie inférieure d’un corps, par laquelle il repose sur ce qui le soutient ou le rattache à quelque chose d’autre : La base d’une montagne. La base du cou. (3) Origine, fondement, principe de quelque chose, ce sur quoi tout repose (souvent pluriel) : Établir les bases d’un accord. […] Issu de Larousse.fr
Dans le contexte de la danse, la base est donc ce sur quoi repose tout le reste. Sans une bonne base, tout le reste ne tient pas, comme le socle pour une statue ou les fondations pour une maison. D’ailleurs, on a plutôt l’habitude de parler de bases (au pluriel), car c’est une combinaison de différents éléments qui sert de support à la danse. Parmi ces éléments de base, on a des postures, des mouvements et des règles. C’est en combinant ces éléments de base que l’on forme un certain style de danse que l’on va pouvoir classifier. Par exemple, l’en-dehors et les pointes font partie des bases de la danse classique. Le flamenco ne comporte pas ces éléments de base et il est donc aisé de ne pas confondre une chorégraphie classique et une chorégraphie de flamenco. Autre exemple, la position de base du tango est très rapprochée (contact important de la cuisse aux côtes flottantes, etc.) alors que dans les positions de base du cha-cha les partenaires sont bien plus éloignés. Sauriez-vous différencier le tango du cha-cha sur les photos ci-contre (en faisant abstraction de ce qui est écrit, évidemment…) ? Ce sont les bases de ces danses respectives qui leur confèrent leur personnalité et leur allure visuelle.
Dans le cadre des danses en couple, les bases donnent non seulement une certaine allure à la danse, mais elles servent aussi à la communication entre les partenaires. Prenons le cas du rock. Pour pouvoir danser ensemble sans heurts et en musique, deux partenaires doivent partager les mêmes bases, car même en rock divers styles et techniques existent. Prenons quelques exemples.
Rock à 4 temps ou 6 temps ? Danser le rock à 4 temps signifie qu’un pas de base est effectué sur 4 temps musicaux. Cela implique donc qu’un pas de base de rock à 6 temps dure 2 temps de plus. Naturellement, s’il n’adapte pas son pas, un danseur à 6 temps ne pourra pas danser avec une danseuse à 4 temps… Sans compter les différences de technique de guidage.
Ligne de danse fixe ou non ? Certaines méthodes ne parlent pas de ligne de danse en rock alors que d’autres imposent une ligne fixe dans l’espace (c’est plus pratique pour les voisins…). Cela entraîne un potentiel décalage dans l’espace entre les partenaires si l’un des deux ne suit pas strictement une ligne de danse.
Connaissance ou non de certaines conventions (appel de main par exemple) ? L’appel de main est un signal visuel permettant à un danseur de demander l’une des mains à sa partenaire. Si la partenaire ne connaît pas le signal correspondant, elle ne présentera pas sa main et le danseur sera gêné pour guider la figure qu’il a en tête.
Ce ne sont que quelques exemples sur une danse donnée, mais je pourrais en énumérer beaucoup d’autres. J’ajoute à cela le fait que de mauvaises bases empêchent une danseuse/un danseur de progresser à un certain moment de son évolution. Un danseur qui ne sait pas faire correctement une pirouette (un tour sur soi) aura du mal à en faire deux à la suite. De même, un danseur qui n’a pas une bonne technique de bas de base de rock ne pourra pas danser correctement sur des tempos très rapides. C’est pour cela qu’il faut prendre le temps nécessaire pour bien maîtriser les bases et ne pas brûler les étapes (les professeurs sont donc parfois obligés de canaliser l’impatience de leurs élèves pour s’en assurer).
Si l’apprentissage des bases est capital, il est aussi essentiel de travailler régulièrement ces bases. Les bases doivent généralement passer à l’état de réflexes ou au niveau de l’inconscient (un peu comme la conduite automobile) afin de franchir les étapes suivantes. Par la suite, lorsqu’on danse et que l’on progresse, on a tendance à se focaliser sur les derniers mouvements ou les dernières techniques qu’on a appris. Et, petit à petit, on perd de vue ces fameuses bases et, même si on les connaît, on peut avoir tendance à en simplifier ou déformer des parties. D’où cette nécessité de rafraîchissement régulier de mémoire. Il n’est pas déshonorant, pour un danseur avancé, de retravailler les bases avec les débutants. Les difficultés rencontrées par ces derniers lui rappellent d’ailleurs un état d’esprit qu’il peut avoir laissé de côté.
Enfin, bien acquérir les bases est aussi important pour des raisons de sécurité. Cela va du simple fait de marcher sur les pieds de son/sa partenaire en valse à la bonne exécution d’une acrobatie de rock acrobatique. Le moindre risque peut avoir des conséquences : un bras mal maîtrisé et c’est l’oeil au beurre noir, un appui non préparé et c’est la chute, etc. Ce genre de désagréments est le propre de toute activité physique et la danse, qu’elle soit de salon ou hip-hop, n’y fait pas exception.
La conclusion de cet article portant sur les bases est simple : pour bien danser, il faut apprendre. Pour bien apprendre, il faut suivre des cours dispensés par des gens sérieux et être conscient des conséquences de bases mal acquises. Et pour parodier une célèbre maxime : bases mal acquises ne profitent jamais !
Voici la fin de l’année calendaire. Une de plus ! En même temps, c’est l’occasion de dire « un article de plus ! ». Ce sera toutefois mon dernier article pour cette année 2010. Et j’ai choisi de faire ce 43ème article de l’année sur un thème réjouissant. À chaque soirée dansante à laquelle je participe ou à chaque spectacle dansant auquel j’assiste, il n’y a rien de plus réjouissant que de voir des gens qui s’amusent en dansant. Mais ce n’est pas à la portée de tout le monde.
Pour commencer ma petite réflexion sur le sujet, je vais parler de l’aspect spectacle. On a toujours dit qu’une danse est belle quand les danseuses et danseurs semblent se mouvoir sans effort, comme si toute leur danse était facile. Évidemment, cela n’est généralement pas le cas et c’est cela qui fait que l’on ne peut pas détacher ses yeux du spectacle : on est captivé. Pour moi, c’est aussi l’une des caractéristiques des films hollywoodiens de l’âge d’or où Fred Astaire semblait parfois flotter au-dessus du sol lorsqu’il dansait. C’est aussi l’effet que font les danseuses étoiles dans les ballets classiques : faire des pointes semble si facile lorsqu’on les regarde danser, mais c’est une tout autre histoire lorsqu’on s’y essaye soi-même ! Bref, tout est une histoire de maîtrise de soi. J’assistais à un spectacle il y a quelques jours où certains danseurs étaient tellement concentrés sur leur chorégraphie qu’ils en oubliaient qu’ils dansaient pour un public. Leur sourire absent ne m’a pas donné envie de les regarder, contrairement à d’autres juste à côté. Si cela se trouve, ils ont fait de jolies figures, mais j’ai préféré regarder, sur la scène, d’autres danseuses/danseurs qui, elles/eux, arboraient un joli sourire et avaient l’air d’apprécier ce qu’elles/ils faisaient.
Voici un extrait vidéo de l’émission « Strictly Come Dancing » (saison 6/2008 anglaise). Le champion de danse sportive Matthew Cutler danse avec Christine Bleakley, une présentatrice de télévision irlandaise. Je vous laisse regarder le spectacle et les sourires omniprésents.
Mais le spectacle n’est qu’un aspect de la danse. La danse libre que l’on pratique en soirée, aussi dite « sociale » en référence à son caractère d’interactivité entre les personnes, est aussi un aspect important. Et là, l’amusement est aussi un facteur d’épanouissement. L’amusement peut être soit intérieur (tout se passe entre les deux partenaires, leur connexion et la musique) ou plus extérieur (l’amusement des partenaires se voit et divertit aussi les spectateurs au bord de la piste de danse). Le premier cas est caractéristique du tango argentin ou du balboa par exemple. On a l’impression qu’il ne se passe pas grand-chose vu de l’extérieur, mais en réalité il y a un dialogue permanent entre les partenaires. Le second cas et davantage visible en salsa, en rock, en lindy hop ou encore en west-coast swing où les danseuses et danseurs s’écartent, se rapprochent, se lâchent, se retrouvent, etc. Il faut évidemment avoir quelques années de pratique dans l’une ou d’autre de ces danses pour être en mesure de se détacher des pas et figures de base et de réellement se lâcher. C’est un peu comme lorsqu’on apprend à conduire : quand on sort de l’auto-école, on doit penser à tout un tas de détails pour bien conduire et on ne peut pas regarder le paysage. Lorsqu’on est davantage expérimenté, on peut se permettre de lever les yeux, se détacher de sa conduite sans pour autant perdre le contrôle de son véhicule et donc apprécier le paysage. Pour résumer, en danse, on commence réellement à s’amuser lorsqu’on peut apprécier le paysage sans mettre la voiture dans le fossé… Tout le monde peut y arriver, mais il faut un minimum de travail.
Pour illustrer cela, je vous propose une vidéo amateur où deux américains (Tatiana Mollmann et Mickey Topogigio) se lâchent complètement en dansant le west-coast swing. Cela fait vraiment plaisir de les regarder s’amuser et le public ne s’y trompe pas. Et pourtant ils dansent…
À chaque Noël, je me dis que je pourrais faire une rubrique « cadeaux pour les danseurs », mais j’y pense toujours un peu trop tard pour que cela soit réellement utile aux visiteurs d’UltraDanse… Cette année, il y a de nombreux coffrets DVD regroupant plusieurs films de danse, des CD de musique pour danser à foison, des calendriers avec des photos de danse, sans oublier les livres pour les passionnés. Quelques idées classiques de dernière minute faute de mieux… En attendant de se retrouver au début de l’année 2011, je vous souhaite d’excellentes fêtes de fin d’année à tous. Il vous reste encore quelques jours en 2010 pour vous amuser en soirée dansante et — pourquoi pas ? — prévoir de passer le réveillon en dansant !
L’idée de cet article m’est venue il y a quelques mois en lisant une vieille méthode de danse de 1946 qui porte le même nom que cet article « Le vrai Swing » de A. de Vyver. Dans ce fascicule de 24 pages, l’auteur décrit ce qu’il considère comme étant le « vrai swing ». Cela amène un peu plus loin ma réflexion à ce que peut être une « vraie » danse… Je commence donc par recopier ci-dessous la préface du fascicule en question qui est édifiante.
Extrait de « Le vrai Swing » de A. de Vyver (1946) Cette méthode a été étudiée spécialement pour permettre à tous d’acquérir rapidement et facilement le « Swing » tel qu’il doit être, c’est-à-dire correct, dansant et spectaculaire. Avant de passer à l’étude des bases fondamentales du « Swing », il est bon, pour la clarté même de l’enseignement, d’établir une classification des différents « Swing » qui firent fureur ces dernières années. Premièrement : Le « Swing » pratiqué en dancing. Deuxièmement : Le « Swing » réel. Le « Swing » pratiqué dans les dancings, appelé aussi « Swing » populaire, ne fut en réalité qu’un « Swing » déformé, dans sa tenue, dans ses figures, dans ses bases, et ceci, afin de simplifier. Ainsi on vit naître un peu partout des « Swing » de toutes sortes et baptisés « Swing » américain, nègre, double-temps, slow-swing, etc… Chaque danseur avait le sien. L’un dansait un « Swing » à quatre temps, un autre dansait en six temps, un autre dansait en huit temps, etc… Et l’on vit dans les bals des excentricités de toutes sortes : tiraillements, sauts séparés, rattrapés, course à cloche-pied (exact). Naturellement, rien de tout ceci ne ressortait du « Swing » et encore moins de la danse. Et l’accueil que ces curieuses figures trouvèrent auprès de la jeunesse ne peut s’expliquer que par l’absence de distractions à laquelle cette jeunesse fut contrainte pendant les années 1940 à 1945. Nous n’enseignerons donc pas ce genre de « Swing », puisqu’il est la déformation même du vrai, et puisque, pour l’apprendre, il n’est pas besoin de leçons. Le « Swing » réel, dit aussi « Swing » de Club, a toujours été le préféré des amateurs de danse. La correction de sa tenue (rapprochée), ses figures spectaculaires, élégantes, ne nécessitant, par ailleurs, que peu de place, en font le « Swing » de prédilection pour les amateurs de vraies danses récréatives. Notons que ses figures ne sont pas toutes composées du même nombre de temps ; on y trouve des 4, 6, 8, 10 et même 12 temps, comme d’ailleurs dans la plupart des danses. C’est à l’étude de ce « Swing » qu’est consacrée cette méthode. Nous étudierons seulement les figures les plus usitées, accessibles à tous, en laissant de côté les fantaisies compliquées nécessitant la présence d’un professeur.
Dans sa méthode, le « professeur A. De Vyver », décrit une danse semblable au foxtrot (position fermée, suivant la ligne de danse autour de la piste de danse) et qui fait alterner genoux fléchis (temps pairs) et genoux tendus (temps impairs) dans un pas de marche. Il y présente le pas chassé, le break sur 6 temps (rien à voir avec un break musical), le croisé tourné sur 8 temps, ainsi que le snap sur 10 temps. Je ne vais pas m’étendre plus loin sur le contenu de cette méthode, puisque ce n’est pas réellement l’objet de l’article.
Ce qui me semble intéressant de remarquer, c’est cette notion de « vrai swing ». Une danse peut-elle être vraie ? Peut-être est-ce oui si l’on veut faire référence à une pratique à un moment donné en un lieu donné par une personne donnée (ou à un standard diffusé), mais peut-être est-ce non dans d’autres cas. Je ne vois pas pourquoi une manière de danser serait plus vraie qu’une autre du moment qu’elles sont toutes les deux pratiquées sur une piste de danse ou une scène. On devine bien que l’auteur se base sur ses connaissances de l’époque (1946, rappelons-le) et qu’il veut tordre le cou à une nouvelle vague de mouvements qui apparaît sous le nom de « swing » alors qu’il pratique lui-même une danse du même nom, mais qui a des mouvements différents. Il faut aussi garder en tête que cette personne est professeur de danse (et, à l’époque, c’est un statut d’importance semble-t-il) et qu’il voit d’un mauvais oeil cette concurrence qui ne nécessite pas de leçons, selon ses mots. Il est évident que l’auteur de ce texte n’a pas le recul que nous avons aujourd’hui pour pouvoir trancher ce débat sur le « vrai swing » qui naît déjà en 1946.
Cela me rappelle un peu une fiche d’UltraDanse.com que je viens de modifier (celle qui présente le rock) et le début de mon travail sur le site il y a 10 ans. J’avais écrit à l’époque que le « vrai rock se danse sur 6 temps ». Je souhaitais diffuser la bonne parole (en tout cas celle dont j’étais partisan à mon stade de maturité). Oui, mais voilà : on évolue au fil de nos nouvelles connaissances et aptitudes. Aujourd’hui, j’ai compris qu’il n’y a pas de « vrai rock », mais plusieurs manières de danser le rock. Le seul problème ensuite est d’être en mesure de danser avec quelqu’un d’autre qui dit aussi danser le rock. Quoi qu’il en soit les différents styles cohabitent sur les pistes de danse lors des soirées. C’est la même chose pour le lindy hop, dont la guéguerre entre « Savoy » et « Hollywood » n’a plus réellement cours, puisque la nouvelle génération de lindy hoppers ne fait plus vraiment la distinction et utilise des techniques issues des deux styles concurrents dans les années 90.
Mais je reviens un peu sur cette histoire de foxtrot/swing du professeur De Vyver. Si ce qu’il appelle swing ressemble beaucoup au foxtrot, c’est qu’il y a une raison. J’ai déjà eu l’occasion de dire ici que le foxtrot, le lindy et le rock peuvent très bien cohabiter sur une piste de danse. En réalité, ce type de cohabitation se faisait déjà dans les années swing au fameux Savoy Ballroom de New York où s’est développé le lindy hop des origines. Voici un extrait issu du documentaire « Frankie Manning: Never Stop Swinging » (PBS, 2009) qui reprend lui-même un film des années 1950 à l’on voit comment l’on dansait au Savoy Ballroom de Harlem. Ce montage vidéo met en évidence les danseurs de « Swing Walk » (autre nom donné au foxtrot) qui dansent autour de la salle alors que les danseurs de lindy hop en occupent le centre.
Y a-t-il un « vrai swing » en tant que danse ? La réponse est non, de toute évidence. Et nous ne le savons que depuis quelques années. Le swing, c’est une famille musicale qui a donné naissance à tout un ensemble de danses. Cela part du foxtrot au West-Coast swing en passant par le lindy hop, le balboa, le shag et même le rock. La meilleure preuve en est que ces différentes danses cohabitent souvent sur les pistes de danse au son d’un même titre. Bien sûr, l’évolution de la musique a élargi l’application de ces danses à d’autres styles musicaux. On danse ainsi le balboa sur du swing manouche, le rock sur de la pop des années 80, le West-Coast swing sur du R’n’B, etc. De plus, ces danses ont subi l’influence d’autres danses qui n’ont rien à voir au niveau musical, comme la salsa ou le tango, ainsi que l’influence d’autres cultures issues de la diffusion mondiale des danses. Ainsi, à chaque époque correspond une certaine pratique de telle ou telle danse. Nous ne dansons plus le lindy hop comme dans les années 40, pas plus que nous le dansons comme dans les années 80 et il y a de fortes chances que nous ne le danserons plus comme aujourd’hui dans 20 ou 30 ans. Tout est un subtil mélange entre influences, maturité, standardisation et contexte musical. Entre les amateurs de la tradition et ceux de la modernité s’établit un équilibre qui évolue selon les époques et les lieux.
Les beaux jours reviennent et chacun remplace petit à petit les gros pullovers à col roulé par une garde-robe plus courte et estivale. Sur les pistes de danse, cela ne se remarque pas toujours, car il y fait souvent chaud quand on bouge sans arrêt (petit appel du pied aux propriétaires de salles ou écoles : une clim’ performante ou, à défaut, une bonne ventilation est réellement obligatoire lorsqu’il commence à faire beau). Lorsqu’on regarde la foule bigarrée des danseurs lors d’une soirée dansante, on remarque qu’il y a de tout : de la robe démodée au pantalon chic aux mouvements fluides ou de la chemise du dernier cri au t-shirt trop grand et bariolé.
Qui n’a jamais souri un jour en regardant un gringalet pas très bien fait de sa personne portant des vêtements de sport high-tech et des lunettes de star s’essouffler au bout de 5 petites minutes de course ? Ce n’est pas vraiment le gringalet qui nous prête à sourire ; c’est plutôt le décalage entre ce qu’il semble être et ce qu’il veut paraître qui nous interpelle. On connaît bien l’adage « l’habit ne fait pas le moine » qui nous suggère que ce n’est pas parce qu’on s’habille comme les sportifs de haut niveau qu’on va automatiquement en devenir un. Les apparences sont parfois trompeuses… Mais revenons à la danse et voyons si l’habit ne fait pas le danseur.
D’un premier abord, nous dirons qu’il y a deux principales manières de concevoir l’habillement quand on est danseuse ou danseur qui fréquente les soirées dansantes. La première est une vision sportive : la danse est vue comme une activité physique et, tout comme un sportif, il faut que le vêtement soit fonctionnel avant tout. Ici, on trouve ceux qui utilisent les tissus « respirants », qui disposent d’une petite serviette accrochée à la ceinture ou qui privilégient le t-shirt simple à la chemise. La seconde manière de voir les vêtements quand on danse est d’ordre esthétique. La danse est perçue comme une belle chose où il faut faire honneur à son partenaire ou sa partenaire et paraître soi-même au mieux de sa forme. Là, on parle de maquillage waterproof, de chemise à la mode ou de robes avenantes. Ces deux visions de la chose sont aux antipodes l’une de l’autre et il faut trouver le juste milieu. En réalité, une robe très jolie, mais nécessitant en permanence un réajustement pour qu’elle ne laisse pas trop voir un décolleté n’est pas idéale et, dans le même registre, un chapeau n’est pas un accessoire très commode pour danser. De même, la serviette éponge pendouillant d’une poche n’est pas toujours très commode quand on souhaite avoir toute liberté de mouvement. Je prends volontairement quelques cas très marqués pour bien faire comprendre la chose. Les danseuses et danseurs expérimentés essayent donc en général de trouver le juste milieu entre élégance et fonctionnalité des vêtements.
Ainsi, peut-on s’interroger sur le fait qu’une danseuse de tango argentin danse mieux en talons très hauts, qu’une danseuse de salsa danse mieux avec un pantalon fluide ou une robe faisant des vagues au moindre mouvement, ou enfin qu’un danseur de lindy hop danse mieux avec un pantalon extralarge coupé style années 30 ? N’est-ce pas uniquement lié à l’apparence ? La réponse n’est pas si claire que cela. En effet, la danseuse de tango argentin est susceptible de souvent pivoter sur l’avant de ses pieds, de s’appuyer en avant sur son danseur, etc. et une position où l’appui est naturellement porté sur les demi-pointes lui facilite le travail. Côté esthétique, il est clair que les talons affinent les jambes et rendent la danse plus jolie. Dans le second exemple, la danseuse de salsa peut se sentir davantage « danseuse latino » avec des vêtements qu’elle va sentir bouger sur ses jambes. Pour danser la salsa, la tenue estivale est de rigueur et l’on se sent davantage l’envie de se déhancher et de tourner si les vêtements que l’on porte font penser aux Caraïbes. Enfin, le danseur de lindy hop sera incommodé s’il danse dans un pantalon moulant du fait de sa position aux jambes légèrement fléchies. Celui-ci sera donc bien mieux dans un pantalon large qui, de surcroît, masque sa position fléchie et améliore sa silhouette et l’allure de sa danse (mais on n’est pas obligé de porter la veste comme dans la photo ci-contre…). L’effet de ces vêtements bien choisis est par conséquent à la fois pratique, esthétique et psychologique.
Dans ces quelques exemples, il semble donc bien que l’habit fasse une partie du danseur ou, pour être plus exact, l’habit favorise une danse dans un certain style. Il est difficile d’imaginer des compétitions de danse sportive où les danseuses de latine auraient de grandes robes à plumes pour danser le cha-cha ou la samba et les danseuses de standard auraient de petites robes échancrées pour danser la valse ou le slowfox. Il est par ailleurs clair qu’un très mauvais danseur restera un très mauvais danseur (tant qu’il n’aura pas progressé, évidemment), peu importe son vêtement, tout comme un excellent danseur restera excellent même dans des vêtements peu seyants. L’endroit où se fait la différence se situe donc au niveau intermédiaire (c’est ce qu’on pourrait appeler le « danseur moyen », et il y en a beaucoup !) où les vêtements peuvent contribuer à la danse, à l’état d’esprit du danseur, voire même à détourner l’attention du public qui verra donc davantage l’aspect général que les pas de danse. Il restera toujours à ceux qui ne savent pas bien danser, et qui veulent garder tout le bénéfice d’une belle allure vestimentaire dans une salle de danse, l’option de rester sur le bord de la piste et de paraître occupé à autre chose. Mais on finira tôt ou tard par se poser des questions et se rendre compte de la supercherie…
Les mots qui composent ce titre peuvent être inconnus à certaines personnes dansant en couple pourtant depuis des années. C’est probablement parce qu’on ne leur a jamais proposé de danser sur du jazz ou du swing de l’âge d’or des big bands. Sur ce type de musique, il est possible de danser le rock, le quickstep, le foxtrot ou le slow-fox. Cependant, quand il s’agit de l’orchestre de Count Basie ou de celui de Duke Ellington, le lindy hop est le must. Développée dans les années 20, 30 et 40 à partir de Harlem (le quartier de New York), cette danse est toujours pratiquée dans le monde entier, particulièrement depuis le renouveau du swing des années 1980. Il a fallu une bonne trentaine d’années au lindy hop pour se remettre de la déferlante du rock’n’roll après la Seconde Guerre mondiale.
Si l’on danse le lindy hop un peu partout (et de plus en plus), ce n’est pas pour autant que tout le monde danse de la même manière. C’est un peu comme pour le rock. On ne le danse pas tout à fait de la même façon dans toute la France, sans parler des variantes à 6 temps et à 4 temps. Bref, la différence par rapport au rock, c’est qu’on entend ça et là qu’il y aurait une rivalité entre le lindy « Savoy style », le lindy « Hollywood style » ou le lindy « Smooth style ». Certaines personnes considèrent les deux dernières appellations comme synonymes, alors que d’autres considèrent que ces styles sont différents même s’ils sont tous les deux issus de la côte Ouest des États-Unis). Essayons de voir ce qu’il en est.
Comme je l’ai dit, le lindy hop est né au Savoy Ballroom de Harlem à la fin des années 20. En réalité, il n’est pas apparu un beau jour comme ça. Il a été développé progressivement à partir du breakaway, du collegiate, du charleston et d’autres influences (dont des acrobates, des comiques et autres spectacles de vaudeville). Les principaux contributeurs à l’évolution de cette danse sont issus des habitués du Savoy qui fait office de plaque tournante, mais d’autres salles de danse de Harlem ont également été impliquées comme le Renaissance Ballroom ou le Cotton Club. C’est à cette époque où, chacun cherchant à épater les autres, les danseuses et danseurs faisaient preuve d’une inventivité telle que la danse pratiquée sur le swing a évolué vers ce que l’on a appelé le lindy hop, mais on peut dire qu’à l’époque, avant qu’une grande tendance ne se dégage, tout le monde avait un peu sa manière de danser le lindy hop. C’est à cette époque que des grands noms de l’histoire du lindy hop ont vécu : Shorty George, Frankie Manning, Norma Miller, Al Minns, Leon James et la troupe des Whitey’s Lindy Hoppers d’une manière générale (elle aussi basée au Savoy dans les années 30). Frankie Manning a énormément contribué à la danse et, avec la troupe que je viens de citer, il a diffusé en soirée, en spectacle ou au cinéma une certaine manière de danser de lindy hop qui est restée sous l’appellation de « Savoy style » (le style du Savoy Ballroom).
Dans cette période riche en nouveautés des années 30 et 40, un certain nombre de personnes sont passées par le Savoy et y ont découvert le lindy hop. En particulier on remarquera un certain Dean Collins qui emmena avec lui les bases du lindy hop du Savoy vers la Californie en 1936 et en particulier Los Angeles dont un quartier, Hollywood, connu pour ses studios de cinéma. Bien sûr, Dean Collins a intégré les bases du lindy et sa pratique les a transformées vers un style qui lui est propre, éliminant par exemple les bounces du style d’origine. On parle souvent du film « Hellzapoppin' » pour la scène de lindy hop dynamique et pleine d’acrobaties effectuée par la troupe des Whitey’s Lindy Hoppers. Mais ce que l’on sait moins (probablement parce que peu d’amateurs de danse ont réellement vu le film en entier…), c’est que Dean Collins danse aussi dans une autre scène de ce film, celle de « Watch the Birdie » au bord de la piscine. On peut voir Dean Collins dans presque 40 films tournés dans les années 40 avec diverses partenaires, mais essentiellement avec Jewel McGowan dont je trouve le style très élégant.
Si l’on devait définir les styles de lindy hop, on pourrait dire ceci. Le lindy hop « Savoy » est très circulaire, la connexion entre les partenaires varie au sein d’une figure afin de laisser une grande liberté à la danseuse, la pulsation rythmique (« bounces ») est très présente, et un certain nombre de figures caractéristiques sont souvent dansées (hand-to-hand charleston, mini dip,… ainsi que de nombreux pas de jazz spécifiques comme le Shorty George, Suzie Q, etc.). Le style Savoy dispose d’une manière de danser « sociale » pour les soirées et les tempos lents à mediums ainsi que d’une manière « spectacle » avec de nombreux kicks pour les démonstrations et les tempos rapides. Enfin, la position « horizontale » des danseurs est orientée vers le/la partenaire, chacun portant son propre poids sans interférer avec l’autre à l’arrêt. Le style « Savoy » conserve donc de nombreux liens avec la culture afro-américaine. Le lindy hop « Hollywood » (ou « Smooth ») se danse plutôt sur une ligne (même si ce n’était pas le cas aux origines de ce style), la connexion est très présente (effet de contrepoids dans le couple) et permet des figures très précises ; de plus, l’ensemble de la danse semble fluide dans tous les axes de l’espace et le triple step n’est pas systématique. Enfin, la position « horizontale » des danseurs est plutôt vers l’arrière, créant une tension entre les partenaires et donc une connexion plus forte. Le style « Hollywood » ou « smooth » s’est éloigné des racines afro-américaines et a donné naissance à encore d’autres variantes à base de lindy hop (où j’avoue parfois ne pas retrouver les bases). Il est à noter que l’on crédite aussi Dean Collins comme étant à l’origine du West-Coast swing qui partage un certain nombre de points communs avec le style « Hollywood ». Notez, par exemple, que le lindy turn s’appelle le whip en West-Coast swing.
Ainsi lorsque la danse swing a commencé à revenir dans les soirées dansantes à partir des années 80, on a naturellement cherché ceux qui étaient là lorsque la danse est née. C’est comme cela que l’on a redécouvert cette danse à New York (mais aussi en Californie) par le biais d’Al Minns, Frankie Manning ou Norma Miller qui ne sont devenus professeurs de danse qu’à cette époque récente. C’est à partir de ce style « Savoy » que le lindy hop s’est donc diffusé de nouveau dans le monde dans les années 80 et 90. Suite à ce renouveau, certains danseurs ont souhaité redonner vie au style originel de Dean Collins dans les années 90. Et c’est là où la dénomination de « Hollywood » est née, pour faire référence à ce style dansé dans les films d’Hollywood. Il faut noter que Dean Collins enseignait la danse en Californie. Ce style a été adopté par les amateurs de swing en recherche de nouveauté et deux « tribus » ont vu le jour en France : les Savoy et les Hollywood (on se croirait dans Koh Lanta…). En général, là où dans une grande ville il y avait des cours de Savoy, on trouvait aussi des cours de Hollywood chez le concurrent. C’est d’ailleurs toujours un peu le cas, un peu comme on a la salsa cubaine opposée à la salsa portoricaine (mais c’est une autre histoire). Cela dit, les danseurs de swing se mélangent au sein des mêmes soirées, car la musique swing reste la base du lindy hop qu’il soit Savoy, Hollywood, Smooth ou que sais-je encore. Ainsi, des figures passent d’un style à l’autre et inversement là où la technique de base ne fait pas obstacle. Car un danseur de Savoy peut avoir du mal à danser avec une danseuse d’Hollywood. En effet, cette dernière attend une connexion forte que le premier n’a pas l’habitude de donner. Apprendre les deux styles peut résoudre l’affaire, mais peut-être est-ce au détriment d’un style visuel marqué ? À chacun de voir. En tout cas, tout cela c’est du lindy hop et cette danse très riche n’a pas fini d’évoluer. À une époque, les danseurs américains de style Savoy venant en France parlaient de « that French lindy hop », ce qui montre bien que les Français ont, eux aussi, apporté leur pierre à l’édifice et ont fait évoluer le lindy hop des origines dans une nouvelle direction.
Avant de clore cet article, j’ai une pensée pour Frankie Manning, décédé il y a presque un an. Il y a un an, j’achevais aussi la traduction et l’édition française de l’autobiographie de ce personnage du lindy hop (« Frankie Manning, l’ambassadeur du lindy hop » ). Coïncidence malheureuse. Frankie n’aura pas eu l’occasion de tenir entre ses mains cette édition française à laquelle il a contribué en personne en écrivant une introduction spéciale pour les Français et en me donnant gentiment des photographies personnelles qui n’ont pas été publiées dans l’édition originale américaine. En revanche, sa co-auteur Cynthia Millman l’a vu et m’en a dit le plus grand bien. En tout cas, je suis heureux que ce livre puisse permettre aux francophones de connaître les origines du lindy hop racontées par l’un de ses créateurs ainsi que le message de paix et de tolérance que Frankie Manning ne cessait de diffuser de son vivant. Ce livre a été primé par la communauté des amateurs de musique jazz en recevant le prix du livre jazz 2009 du « Hot Club de France » et je ne cesse de recevoir des retours positifs sur cet ouvrage depuis qu’il est disponible. Cela m’encourage aussi à poursuivre un travail sur un livre présentant les figures de base du lindy hop d’un point de vue technique et qui sera disponible à la vente cet été.
« Around the world » est le nom d’une figure bien connue des danseurs de rumba, salsa et de lindy hop. En rumba, la danseuse fait le tour du danseur alors que celui-ci reste sur place. En salsa, ce nom fait référence à différentes figures où la danseuse tourne autour du danseur et tourne aussi sur elle-même. En lindy hop, on a affaire soit à une figure où le danseur et la danseuse tournent en même temps sur eux-mêmes soit à une acrobatie qui correspond à la « ceinture » de rock acrobatique. Bref, en danse en couple, dans le tour du monde (« around the world »), le danseur est au centre du monde et c’est généralement la danseuse qui en fait le tour… Mais le « Around the world » dont je voulais vous parler ici est tout autre puisqu’il s’agit de la chanson du groupe Daft Punk.
Après avoir revu récemment le clip des Daft Punk, j’ai eu envie de le faire partager à ceux qui ne le connaissaient pas. Certains auront davantage vu le « punk » dans le nom de ce groupe français de musique électronique, d’autres auront trouvé un peu étrange le fait qu’on ne voie jamais le visage de ses membres, masqué derrière des casques ou des costumes. Mais il ne faut pas s’arrêter là, il faut écouter leur musique et regarder leurs clips qui sont toujours très imaginatifs. « Around the world » n’est pas un titre récent (il date de 1997), mais je ne me lasse jamais de revoir le clip associé avec sa chorégraphie. J’intègre ci-dessous la vidéo du site Dailymotion, sous copyright EMI Music.
Le principe est amusant : chaque danseur ou groupe de danseurs représente un instrument et chaque mouvement qu’ils effectuent représente une note ou un bruit. On commence par la basse (les sportifs) dont les notes descendent la gamme à répétition. Puis les percussions sont introduites (momies allongées au milieu de la scène) et arrive le synthé (plus aigu, représenté par les nageuses) dont le motif se dévoile progressivement. Le piqué de synthé/guitare (les squelettes) débute plus loin suivi pas le vocoder (cosmonautes) qui scande « Around the World » en boucle. Finalement, tout ce beau monde se retrouve à l’unisson une fois que la mise en scène est faite avec les cosmonautes qui tournent « autour du monde » constitué des différents instruments. Ensuite chaque instrument aura droit à son petit solo via un motif musical plus évolué (et la danse qui va avec, évidemment). Enfin, la lumière baisse à mesure que le volume sonore décroît.
Je trouve que l’idée de ce clip est géniale. De plus, elle se révèle un support adéquat pour s’exercer à écouter toutes les composantes d’un morceau de musique sans exception. Ici, le visuel et le gestuel recoupent ce que l’on entend. N’est-ce pas une partie de ce que l’on fait lorsque l’on danse et particulièrement lorsqu’on fait une chorégraphie ? Le chorégraphe essaye de suivre la musique dans certains cas (un peu comme dans ce clip) ou essaye de s’y intégrer dans d’autres cas. Le fait est que, lorsqu’on danse en improvisant dans une soirée, chacun d’entre nous va être plus ou moins sensible à telle ou telle composante de la musique. Certains suivront la batterie, d’autres la basse, d’autres la mélodie, etc. Pour progresser, il ne suffit pas de savoir tout le temps entendre la même composante pour danser dessus ; il faut aussi savoir basculer sur les autres qu’on a moins l’habitude de suivre. Je ne sais pas si je suis très clair ici… J’essaye de m’expliquer un peu plus. Supposons qu’un danseur (disons de rock pour se fixer les idées) ait tendance à suivre la batterie : ses pas auront tendance à être plutôt réguliers avec quelques breaks interprétés basiquement par des immobilisations. À présent, supposons que, de temps en temps, ce même danseur soit en mesure d’entendre la mélodie chantée qui fait, par exemple, des petites notes durant le break : il aura alors tendance à casser le rythme impulsé par la batterie et à faire des petits pas plus recherchés pour suivre les notes de la mélodie chantée. J’oubliais de préciser : danser ce n’est pas simplement une succession de figures, il faut aussi écouter la musique pour s’en inspirer. Sinon, autant danser au son d’un métronome…